Corps et psychiatrie : un couple embarrassant

Conjuguer corps et psychiatrie dans nos pratiques cliniques.

Pas seulement le corps de l’image mais celui du sujet en souffrance.  Un corps dans sa dimension réelle: abîmé, rejeté, squelettique, obèse, perverti, vieilli, scarifié, intoxiqué, customisé ! … loin du registre auréolé des médias il semble faire retour dans notre modernité sous une forme univoque ou standardisée : celle d’une maladie-à-traiter.

Ce corps n’a jamais cessé d’être pour les cliniciens de la psychiatrie source de malentendus.

Il ment, se dénude, s’expose ! Il sonne faux quand la parole semble sonner juste ; il dit que tout va mal quand le sujet dit que tout va bien. Il dit du faux et du vrai parfois en même temps. Il montre sans se voir à un interlocuteur qui ne saura parfois qu’en dire.
Ce corps en psychiatrie fait partie de la clinique psychanalytique en tant qu’il est comme l’inconscient : profondément polysémique.

Il laisse à chaque soignant la charge de discerner les actes, les paroles, les soins et le tact nécessaires à leurs réalisations.
Ce corps, faut-il le toucher ou non, en parler ou non, le faire bouger ou l’immobiliser, le couvrir ou le découvrir, l’animer, l’apaiser….

Dès lors que l’on se réfère à des concepts essentiellement psychanalytiques, ceux-ci, loin d’une conception binaire, cherchent à construire du lien pour tempérer l’impact féroce des souffrances du sujet sur son corps. A nouer inlassablement le registre de la parole, de l'image et du sexuel pour l’appréhender et le traiter.

Comment interroger l’arrimage entre le langage, le corps et le social? Peut-on se permettre de n'en prendre en compte que la dimension symbolique sans pour autant verser dans le comportementalisme strict? Soigne-t-on différemment un corps, par exemple en hôpital psychiatrique, surtout si on se réfère à des concepts psychanalytiques ?

Ces questions posées comme un pari sur nos pratiques exigent de nous que nous puissions rendre compte du statut du corps à travers une approche éclairée de différentes disciplines !